Virginie Tetoofa : "Paripari fenua, un magazine à mi-chemin entre enracinement et modernité"

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PAPEETE, le 29 septembre 2017 – Cette série de magazines de 13 minutes, diffusés tous les mercredis à 19h30 sur Polynésie 1ère, met en lumière le rapport que les Polynésiens entretiennent avec leur terre. Le concept ? Un épisode. Un lieu. Deux personnages : un orateur qui exalte son passé et un jeune qui donne sa vision de l’avenir. Virginie Tetoofa, la réalisatrice, revient sur la genèse de ce projet produit par Onesia Pacific Storytellers, la société de Marie-Hélène Villierme.

Comment est né le concept de l’émission ?

"L’idée de départ est venue d’un constat simple que j’ai fait fin 2015, alors que je revenais d’Europe où j’ai travaillé plusieurs années dans l’audiovisuel. Le constat était le suivant : les paripari fenua, c’est-à-dire les cartes d’identité d’une terre à la manière polynésienne, transmises de manière orale, se simplifiaient. Les noms de certains lieux ou toponymes disparaissaient de plus en plus des traditions orales, ou étaient de plus en plus oubliés ou méconnus. À l’époque, je réalisais un mini-documentaire pour le Service de la culture dans le cadre du classement de Taputapuātea au patrimoine de l’Unesco. Dans ce documentaire, le Service de la culture avait recueilli un paripari fenua des vallées de Hotopuu et d’Opoa. Je trouvais la forme belle et poétique, aussi bien en tahitien qu’en français ; et je me suis demandée pourquoi personne ne faisait une émission là-dessus…"

En quoi ces paripari fenua sont-ils importants ?

"Les paripari fenua font partie de notre patrimoine immatériel, et malgré quelques détenteurs de ces connaissances toponymiques, de leurs histoires, de leurs légendes (à chaque lieu est souvent rattaché une histoire de lignée, de chefferie, ou une légende), j’avais l’impression que peu de jeunes s’intéressaient à ces histoires… Il y avait pourtant là matière à faire un beau produit audiovisuel ; je voulais juste susciter l’intérêt du public, qu’il soit jeune ou moins jeune, branché culture ou pas. Pour qu’on prenne tous conscience de la beauté de la nature qui nous environne, de ces histoires légendaires laissées par nos anciens et afin qu’on préserve ce qui peut encore l’être de notre culture polynésienne… Sans l’imposer, mais juste pour donner l’envie à ceux qui le souhaitent de redécouvrir notre culture et l’art oratoire qu’est le paripari fenua ; dans un souci de mémoire. La série est en tahitien/français, sous-titrée en français, et nous allons également faire une version sous-titrée en anglais pour l’exporter."

C’est dans ce sens que vous mettez en scène deux personnages ?

"Oui, je voulais démontrer que cette culture était encore vivante, et que certains l’appliquent encore dans leur vie de tous les jours mais y posent un regard moderne. C’est comme ça que le personnage "porteur d’avenir" est apparu comme une évidence. Ainsi, à chaque épisode il y a un orateur, un paripari fenua, une légende, et un porteur d’avenir. Chacun d’eux posant son regard sur la réalité de sa commune. Je voulais donner une image positive de notre jeunesse. Il y a dans ce pays des richesses naturelles et humaines, des personnes qui entreprennent en s’appuyant sur des pratiques ancestrales, d’autres qui s’en sont détachées sans doute mais qui souhaitent faire évoluer le fenua. Par exemple, Nicky Verghnes à Mataiea s’est réapproprié l’art du ahima’a pour en faire son businness, Sarah Roopinia, fondatrice d’Ono’u, embellit les murs des villes notamment ceux d’Uturoa en s’appuyant sur des histoires polynésiennes, etc."

Où nous emmènera le prochain épisode mercredi ?

"Dans le prochain épisode, à Papara, Hira Teriinatoofa nous emmène à la découverte de Taharuu, de son travail de coach et du caillou légendaire du spot de surf de Taharuu."


“Je vois la culture polynésienne comme une culture vivante et en constante évolution.”
Quelles étaient les principales difficultés ?

"Le plus dur dans cette série, c’est de réussir à rattacher les uns et les autres, à faire le lien entre le passé et le présent tout en questionnant notre devenir. Il y a aussi ce côté hybride de la série qui est un plus pour fédérer le plus d’audience. Nous mêlons prises de vues réelles (drone, sub, etc.) à de l’animation 3D, tout en ayant recours à une mise en scène de fiction, un planning de tournage, des découpages techniques, une création musicale… Tout cela a mis plus d’un an à se mettre en place et je pense qu’on est tous fiers du résultat ! J’espère vraiment que ce programme saura conquérir un public le plus large possible."

Donnez-nous votre vision de la culture polynésienne ?

"Je vois la culture polynésienne comme une culture vivante et en constante évolution. Une culture millénaire et orale que l’on doit se réapproprier. On doit réapprendre notre histoire et la culture ancienne ma’ohi, en tirer ses enseignements, et surtout la transmettre au plus grand nombre. Je crois qu’il faut préserver ce qui peut encore l’être : les langues, les paripari fenua, les légendes, les histoires, l’art oratoire, les chants, les danses, les valeurs polynésiennes de l’accueil et du partage, les rites, les marae, les rahui, le tatouage, etc. Je pense que la culture polynésienne doit préserver ses traditions tout en faisant preuve d’ouverture. C’est cela qui décrirait le mieux le concept de "Paripari fenua" : un magazine à mi-chemin entre enracinement et modernité. Le métissage en somme."

Quels sont vos prochains projets ?

"Dans la foulée, en novembre 2017, nous repartons sur un documentaire sur le même concept que la série "Paripari fenua" pour Nouvelle-Calédonie 1ère /France Ô qui nous a commandé un unitaire de 52 minutes, toujours tourné en Polynésie, avec des histoires, des personnes et des paysages du fenua, dans le cadre de la case "Archipels"."



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