Sa sœur meurt après 15 heures d'évasan, elle demande des explications à la justice

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Sa sœur meurt après 15 heures d'évasan, elle demande des explications à la justice
PAPEETE, le 25 septembre 2016 – Au début du mois de juillet, une jeune femme de Ua Huka est morte en arrivant à Tahiti après plusieurs heures d’évasan. La sœur de cette dernière a écrit au procureur de la République. Une enquête est en cours.

Mardi 5 juillet, aux alentours de 14 heures, sur l’île de Ua Huka, aux Marquises. Une femme de 29 ans arrive au cabinet de l’infirmier. Atteinte de la leptospirose, son état de santé est très préoccupant. "Sa tension était à 6. Elle était en état de choc septique. Elle n’allait vraiment pas bien. Son pronostic vital était engagé", a expliqué l’infirmier le lendemain des faits. Ce dernier a tout de suite déclenché le processus d’évacuation sanitaire.

La malade sera prise en charge vers 20h30. Cette dernière et sa sœur, elle aussi malade de la leptospirose, arriveront à l’hôpital Taiohae, aux Marquises vers 23 heures. La première doit être évasanée vers l’établissement du Taaone, à Tahiti, car son état de santé est trop grave. Elle y arrivera le mercredi matin vers 5h35 avant de décéder quelques minutes plus tard, après plus de 15 heures d’évasan.

Cette histoire a fait grand bruit dans l’archipel des Marquises. De nombreuses personnes se sont interrogées sur les conditions de prise en charge de la patiente et sur les moyens déclenchés pour son évasan. Tout comme la sœur de la victime.


UNE ENQUÊTE PRÉLIMINAIRE OUVERTE
Remise sur pieds, Manuia* a écrit un courrier au procureur de la République dans lequel elle pose de nombreuses questions concernant l’évacuation sanitaire de sa sœur. Le courrier est arrivé au parquet au mois de juillet. A la suite de cela, une enquête préliminaire pour homicide involontaire a été ouverte.

"Elle a pour objet de vérifier si la mort de la jeune femme n’est pas imputable au processus des évasans", confie une source proche du dossier. Des personnes ont été entendues.

Le 14 septembre dernier, le Haut-commissariat a annoncé par voie de presse la délivrance d’un agrément de bateaux privés pour assurer des transports de passagers en cas d’urgence. Le document indique : "Sensibilisé par les difficultés que rencontrent les habitants des îles pour se déplacer en cas d’urgence, notamment dans l’archipel des Marquises et celui des Tuamotu Gambier, le haut-commissaire a décidé de permettre l’intervention de bonitiers et de poti marara dans le transport de personnes lorsqu’une situation d’urgence le justifie." Le haut-commissaire précise que la démarche permet d’assurer plus de sécurité aux personnes transportées plutôt que de "feindre d’ignorer" une pratique qui se fait depuis des années.

L’enquête sur la mort de la jeune femme a été confiée à la brigade de gendarmerie des archipels. Si le procureur de la République juge qu’il est nécessaire de donner suite, des mises en examen pourraient prononcées.

En attendant, à Ua Huka, le sujet reste très sensible.


Une semaine plus tard, un drame évité de justesse
"De nombreuses vies ont été gâchées depuis trop d’années à cause de ses évasans qui durent des heures et de ces moyens inadaptés…", tonnent de concert plusieurs habitants des Marquises.

Une semaine après l’évacuation de la malade de la leptospirose, une femme a dû être prise en charge pour une fausse couche sur l’île de Hiva Oa. L’équipe médicale a tout de suite déclenché le processus d’évacuation sanitaire. Un avion d’Air Archipels, partant de Tahiti, a été dépêché. Au dispensaire, la patiente a fait une hémorragie par voie basse. Elle se vidait de son sang. Les secours ont transfusé la patiente, sans avoir analysé le sang. L’avion a atterri sur l’île à 20 heures. La patiente est arrivée à l’hôpital à Tahiti, le lendemain matin vers 4 heures du matin. Elle serait aujourd’hui en bonne santé.

En 2014, un homme de 33 ans a eu un très grave accident de voiture. Son évacuation sanitaire avait duré plusieurs heures, faute de moyens de transport maritimes ou aériens adaptés. Le trentenaire avait succombé de ses blessures pendant son transfert à l’hôpital du Taiohae, aux Marquises. "Je reste persuadé qu’il aurait pu être sauvé s’il avait été pris en charge plus rapidement. Je vois son fils presque tous les jours, ce n’est pas facile…", témoigne un habitant de l’île.

A Ua Pou, une jeune maman a amené son bébé au dispensaire vers 16 heures. Le nourrisson était gravement malade et il nécessitait une évasan. A deux heures du matin, il a pu être emmené vers l’hôpital, en bateau. Arrivé sur place, le bébé est décédé.


Les évasans aux Marquises, un sujet sensible
Sa sœur meurt après 15 heures d'évasan, elle demande des explications à la justice
La problématique des évasans aux Marquises n’est pas un fait nouveau. Jusqu’à 2007, une société privée a assuré la prise en charge des évasans mais depuis, il n’y a plus d’hélicoptère.

La majorité des maires des îles de l’archipel estiment que c’est pourtant la seule solution pour assurer les évasans d’urgence. D’autres, pensent qu’il faudrait que moyens aériens et maritimes soient couplés. Notamment pour les petites îles comme Ua Huka où il n’y a pas d’aérodrome.

La Fédération d’entraide des secours en mer a présenté plusieurs projets pour améliorer, en partie, ce problème. Elle souhaite la mise en place de trois Vedettes de sauvetage et d’assistance médicale (VSAM) à Hiva Oa, Ua Pou et Ua Huka qui pourront relier les îles entre elles.

Le mois prochain, un bateau, mis en place par l’Etat, sera disponible pour assurer les évasans programmées entre les îles sud de l’archipel.


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